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January 18, 2024

Les voix de la MPR : Monique Marsh, Aurora (ON)

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Je m’appelle Monique et j’aimerais vous raconter mon expérience en tant que donneuse vivante.

Mon mari, David, et moi avons 58 ans. David est atteint de MPR, ainsi que l’une de nos enfants (de ce que savons à ce jour). De nombreuses personnes dans la famille de mon mari ont également cette maladie.

David fait partie d’une fratrie de cinq enfants, dont quatre ont la MPR, une maladie qui leur vient de leur père. D’ailleurs, plusieurs des frères et sœurs de mon beau-père avaient aussi la MPR.

Avant de nous marier, mon mari et moi avons discuté de sa maladie. Nous ne savions pas vraiment ce qu’impliquerait le fait que nos enfants puissent aussi avoir cette maladie, mais sur le coup on s’est dit : « C’est quoi, le pire qui puisse arriver? ». Ne pas avoir d’enfants a toujours été hors de question à nos yeux, parce qu’on en voulait, autant lui que moi, et qu’on vient de familles nombreuses où tout le monde se soutient.

 Quand mon mari a commencé à souffrir d’insuffisance rénale, c’est sa sœur aînée, la seule de la fratrie à ne pas avoir la MPR, qui lui a fait don d’un rein. Le frère de David s’est aussi fait greffer un rein il y a environ sept ans. C’est un·e ami·e qui lui en a fait don. Leur plus jeune sœur, quant à elle, a reçu une greffe en octobre 2021. C’est son époux qui lui a fait don d’un rein.

Depuis sa greffe, David prend des immunosuppresseurs tous les jours. Mais leur utilisation à long terme peut avoir certaines répercussions. David a eu un cancer de la peau. Cela dit, nous sommes très heureux·ses que cette greffe ait pu lui permettre de vivre plus longtemps et qu’il soit encore parmi nous.

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En octobre 2020, Sheena, l’une des sœurs de David, a commencé à faire savoir à son entourage qu’elle allait avoir besoin d’une greffe de rein. Cela faisait longtemps que j’envisageais de lui faire don d’un de mes reins, mais il se trouve que le moment était mal choisi pour moi et pour ma vie familiale. Je n’ai donc pas été en mesure de lui donner mon rein, du moins à ce moment-là.

En février 2021, Sheena a découvert que son mari ne pourrait pas être son donneur. À ce moment-là, les choses s’étaient un peu calmées dans ma vie, j’avais plus de stabilité, et j’ai commencé à envisager sérieusement de passer les examens nécessaires pour voir si Sheena et moi étions compatibles.

Parmi les raisons qui m’ont poussée à le faire, il y avait le fait que Sheena ait quatre filles, ainsi que des petits-enfants. Je voulais vraiment qu’elle puisse en profiter au maximum. En plus, elle est médecin de famille et travaille comme obstétricienne dans une petite ville. C’est vraiment une personne formidable et les membres de sa communauté ont besoin d’elle.

J’ai aussi pensé à mes propres enfants, ainsi qu’à mes neveux et nièces qui ont la MPR, en espérant qu’un jour quelqu’un leur vienne en aide à son tour. Je serai trop âgée pour pouvoir faire don d’un rein à mes enfants au moment voulu. Or, je voulais vraiment faire ce don quand j’étais encore en santé et en mesure de le faire.

C’est pourquoi j’ai commencé à faire les démarches pour devenir donneuse d’organe de mon vivant. J’ai bien fait mes devoirs : 12 pages de formulaire d’inscription à remplir! Je l’ai envoyé autour du 1er mars 2021 et on m’a confirmé que mon dossier avait été validé, que je pouvais donc passer la première partie des examens. On m’a mise en contact avec une personne qui travaillait au Toronto General Hospital et qui m’a accompagnée tout au long du processus.

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Tous mes résultats d’analyse étaient très bons. J’ai rapidement passé les examens et vers août 2021, on m’a contactée pour me dire que tout semblait correct, qu’apparemment j’étais compatible. La fin de semaine de la fête du Travail, on nous a proposé différentes dates pour une potentielle greffe en octobre et, le 29 octobre 2021, l’opération a eu lieu. C’est là que j’ai fait don de mon rein gauche à Sheena. Deux semaines plus tôt, mon autre belle-sœur atteinte de MPR recevait elle aussi une greffe.

Sheena va très bien à présent. La première année, elle a fait face à pas mal de difficultés. Ça a pris environ un an avant qu’elle aille mieux, mais elle va parfaitement bien maintenant. J’en suis très reconnaissante.

À moi aussi ça m’a pris un moment de me remettre de l’opération. C’est très demandant. Je ne m’attendais pas à avoir mal pendant aussi longtemps, mais j’ai passé des examens pour vérifier que tout allait bien et il n’y a eu aucune complication. Mon chirurgien a été incroyable, et il était vraiment fantastique avec les patient·e·s.

S’il y a bien une chose que j’aurais aimé savoir avant de faire ce don, c’est qu’après coup j’éprouverais des sentiments un peu mitigés. Je ne regrette pas mon geste. Mais pendant le mois de janvier qui a suivi l’opération, j’ai eu un passage à vide. J’ai contacté l’hôpital et ai demandé à parler à une travailleuse sociale. Je m’attendais à ce qu’on bénéficie d’une forme de soutien après l’opération.

Mais ce n’était pas le cas. C’était un peu comme si on était censé·e·s reprendre notre vie comme si de rien n’était, mais moi je ne savais absolument pas comment faire. J’avais pris part à tout ce processus, ce qui n’est quand même pas rien, et j’avais l’impression qu’on me laissait tomber après coup.

Nos enfants étaient encore très jeunes au moment de la greffe de mon mari. J’avais peur qu’il meure pendant l’opération. À l’époque, il y avait un programme de soutien par les pairs et j’ai pu échanger avec deux bénévoles qui en faisaient partie et dont le mari avait aussi bénéficié d’une greffe de rein. J’ai trouvé que le programme de soutien par les pairs était génial. Il m’a beaucoup aidée.

Je ne sais pas s’il est toujours en place, mais ça pourrait être une bonne idée de le suggérer aux centres de don vivant. J’aurais vraiment aimé que les donneurs et donneuses puissent bénéficier d’un soutien plus marqué après l’opération, en particulier de la part de personnes qui comprennent le processus de greffe et ce qu’on a dû traverser. E

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Informer un maximum de gens sur les dons vivants, c’est une cause qui me tient particulièrement à cœur. Par exemple, vous pouvez donner un rein si vous êtes en bonne santé, même si vous n’êtes plus tout·e jeune. J’avais 56 ans à l’époque, et Sheena en avait 60 quand elle a reçu sa greffe, et on va toutes les deux très bien!

Pas besoin d’être une athlète, même si j’aurais préféré avoir été un peu plus en forme. Il n’est pas non plus nécessaire d’avoir un lien de sang avec la personne à qui on donne un rein. Aussi, vous pouvez faire don d’un rein sans que cela change votre vie du tout au tout. Et vous pouvez aussi être en pleine santé même si vous n’avez qu’un seul rein.

Nombre de personnes avec qui j’ai partagé mon histoire n’étaient absolument pas informées qu’on pouvait faire un don de rein de son vivant, et que ce n’est en réalité pas si compliqué. Il arrive même que des membres du corps médical n’aient pas pleinement connaissance de l’étendue des possibilités. Il est important de défendre vos propres intérêts et de vous fixer un objectif. Par chance, je savais qu’il était possible d’avoir recours à une greffe préventive, car plusieurs membres de ma famille en avaient bénéficié.

Je suis vraiment heureuse que Sheena ait pu bénéficier d’une greffe assez tôt dans sa maladie, plutôt qu’après avoir dû commencer une dialyse. Elle allait bien sur le plan physique au moment de passer sur la table d’opération, elle a donc pu en tirer le meilleur. Je ne voulais pas qu’elle doive passer par une dialyse. Cette opération lui a permis de vivre plus longtemps, en meilleure santé et heureuse. C’est miraculeux, parce que c’est vraiment rare de pouvoir bénéficier d’une greffe avant d’en avoir réellement besoin!

Ce que je voudrais, c’est qu’un maximum de monde parle des dons vivants pour que mes enfants, mes nièces et mes neveux, qui vont probablement avoir besoin d’une greffe à un moment donné, puissent trouver quelqu’un pour leur faire don d’un rein plus facilement.

C’est une cause qui est vraiment chère à mon cœur, et j’aimerais que mon message puisse toucher autant de gens que possible, non seulement parmi les personnes qui ont des proches atteint·e·s de MPR, mais aussi parmi celles qui n’en ont pas. Les greffes d’organes issus de donneurs ou donneuses vivant·e·s nous unissent et rassemblent des personnes de tous horizons. Mon objectif est de convaincre toutes les personnes qui lisent cet article de partager mon histoire avec leur famille, leurs ami·e·s et leurs collègues de travail. Ensemble, nous pouvons diffuser des informations très précieuses, et à terme, sauver des vies!

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